Alzheimer et dépression : pourquoi ces deux pathologies sont-elles parfois confondues ?
La maladie d'Alzheimer et la dépression sont deux maladies à prendre en compte sérieusement. Elles impactent profondément la santé cognitive, physique et la qualité de vie de la personne. Dans les deux cas, un mauvais diagnostic et une absence d'accompagnement adapté peuvent conduire à un drame.
Malheureusement, au début de la maladie, il est fréquent que l'on soupçonne la personne atteinte d'Alzheimer de faire une dépression.
Certains symptômes du début se ressemblent et peuvent prêter à confusion. Les troubles légers de la mémoire, les changements d'humeur et les difficultés cognitives sont présents dans les deux cas, mais leurs origines et implications diffèrent grandement. La personne cesse de faire ses activités habituelles, elle aime de moins en moins les sorties et les repas avec des groupes d'amis, elle parle moins. La fatigue aussi est présente dans les deux cas.
Alors quand la personne est jeune, il est fréquent que les aidants et les professionnels pensent avant tout à une dépression. Malheureusement, ce retard de diagnostic entraine un retard de soins, mais aussi des conflits au sein de la famille. Les aidants ont la sensation que la personne malade ne fait rien pour sortir de sa dépression (alors que quoi qu'elle fasse, elle ne peut pas se sortir d'une maladie d'Alzheimer).
Il est essentiel de bien comprendre les différences entre ces deux conditions pour un diagnostic et un traitement appropriés.
Comprendre Alzheimer et la dépression
Qu’est-ce que la maladie d’Alzheimer ?
La maladie d’Alzheimer est une affection neurodégénérative marquée par une détérioration progressive des cellules nerveuses du cerveau. Cette détérioration entraîne une perte de mémoire, des troubles du langage, des difficultés d’orientation dans le temps et l’espace, des difficultés de concentration.
Les symptômes courants incluent également l’apraxie (difficultés à effectuer certains gestes), l’agnosie (perte de reconnaissance des objets ou des personnes), et l’anosognosie (la personne n’a pas conscience de ses troubles).
Sur le plan biologique, la maladie d’Alzheimer se caractérise par la formation de plaques amyloïdes et d’enchevêtrements neurofibrillaires dans le cerveau, causés par une agrégation anormale de la protéine Tau. Ces lésions neuronales progressent avec le temps, débutant souvent dans la région hippocampique avant de s’étendre au cortex cérébral, expliquant ainsi l’aggravation des troubles cognitifs.
Qu’est-ce que la dépression ?
La dépression est un trouble mental défini par une tristesse prolongée, une perte d’intérêt pour les activités habituellement agréables, ainsi que des modifications de l’appétit et du sommeil, et une fatigue générale. Elle peut également se manifester par des sentiments de culpabilité, une faible estime de soi et des difficultés de concentration.
Bien que la dépression puisse affecter les capacités cognitives, elle est généralement traitable par des thérapies psychologiques et des médicaments adaptés.
La dépression peut survenir à tout âge, mais elle est particulièrement préoccupante chez les personnes âgées. Chez ces dernières, elle peut être masquée par d’autres symptômes ou maladies et souvent déclenchée par des événements tels que la perte d’un proche, des problèmes de santé chroniques ou des changements majeurs dans la vie quotidienne.
Les similitudes qui peuvent prêter à confusion
Symptômes communs entre Alzheimer et dépression
Une des raisons principales pour lesquelles Alzheimer et dépression peuvent être confondus réside dans les symptômes qui se chevauchent. Des troubles de l’humeur, une perte d’intérêt pour les activités, un isolement social et des difficultés de concentration sont des signes présents dans les deux conditions.De plus, les deux conditions peuvent entraîner des changements dans les habitudes de sommeil et une perte d’appétit, compliquant ainsi le diagnostic.
Il est aussi fréquent que les personnes atteintes d’Alzheimer fasse aussi une dépression, notamment en début de maladie quand elles ont conscience de leurs troubles. Elles réalisent que quelque chose ne va pas. Qu’elles n’arrivent plus à faire ci ou ça. La maladie d’Alzheimer les rend très fatiguables, mais du coup les personnes peuvent déprimer de ne pas être assez en forme pour faire telle ou telle activité…
Ensuite, on leur fait un diagnostic qui est très lourd à vivre avec la conscience que tout va empirer et qu’on va se perdre soi-même.
Manifestations comportementales et émotionnelles
Les manifestations comportementales et émotionnelles sont également des domaines où Alzheimer et dépression se ressemblent. L’apathie, symptôme fréquent de l’Alzheimer, se caractérise par une perte d’intérêt, une diminution de la motivation et un retrait social.
Ces signes sont souvent similaires à ceux de la dépression, où la personne peut également se retirer socialement et perdre l’intérêt pour les activités qu’elle appréciait auparavant.
Les fluctuations émotionnelles, telles que les sautes d’humeur, l’anxiété et l’impatience, sont communes aux deux conditions. Dans la maladie d’Alzheimer, ces changements peuvent être imprévisibles et rapides, ce qui peut être confondu avec les symptômes émotionnels de la dépression.
De plus, les personnes atteintes d’Alzheimer peuvent exprimer des sentiments de culpabilité ou de dévalorisation, semblables à ceux observés dans la dépression classique.
Alzheimer ou dépression ? Les étapes du diagnostic
Dans la moitié des cas, la maladie d’Alzheimer commence par une période dépression. Cela ralentit le diagnostic de maladie d’Alzheimer, car ses symptômes sont confondus avec ceux de la dépression. Il faut parfois attendre que la dépression soit traitée avant de découvrir la maladie d’Alzheimer sous-jacente. Toutefois, certaines choses peuvent mettre la puce à l’oreille des médecins. En effet, lors de l’entretien, ceux-ci peuvent se demander s’il s’agit d’une première dépression ou s’il y a déjà eu des antécédents. De même, le médecin se demandera s’il y a eu un événement qui a ou non déclenché cette dépression. Malheureusement une dépression peut commencer sans cause apparente. Cependant, ses réponses peuvent inciter le médecin traitant à orienter son patient à un neurologue, ou à demander des examens complémentaires permettant de diagnostiquer plus sûrement un début de maladie d’Alzheimer.
Les étapes cruciales du diagnostic d’Alzheimer
Diagnostiquer la maladie d’Alzheimer implique un processus détaillé pour distinguer cette condition des autres causes de déclin cognitif. La première étape consiste à écarter d’autres pathologies courantes telles que les effets des médicaments, une carence alimentaire, une infection conséquente.
Les médecins recueillent une histoire médicale complète du patient, ainsi que des informations de proches, comme des membres de la famille ou des amis. Cet entretien est complété par des tests de fonction cognitive, tels que le Mini-Mental State Examination (MMSE), pour évaluer la mémoire, la résolution de problèmes, l’attention et le langage.
Des examens médicaux standard, comme des analyses de sang, d’urine et de liquide céphalo-rachidien, sont effectués pour identifier d’autres causes possibles des symptômes. Des scans cérébraux, tels que la tomographie par émission de positons (PET), l’imagerie par résonance magnétique (IRM) ou la tomographie computérisée (CT), sont utilisés pour visualiser la structure du cerveau et exclure des lésions intracrâniennes.
Les biomarqueurs, tels que les protéines beta-amyloïde et tau, peuvent être mesurés dans le sang ou le liquide céphalo-rachidien pour confirmer la présence de la maladie d’Alzheimer. Ces tests biomarqueurs sont de plus en plus utilisés pour soutenir le diagnostic et déterminer le stade de la maladie.
Si les imageries révèlent une maladie d’Alzheimer, cela ne peut pas être confondu avec une dépression. Le diagnostic est très clair. Par contre, la personne atteinte d’Alzheimer peut aussi faire une dépression en plus de ses troubles neurodégénératifs.
Et si votre proche souffrait des deux : Alzheimer ET dépression
50% des personnes atteintes d’une maladie d’Alzheimer souffrent un jour ou l’autre de dépression. La dépression chez une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer peut faire s’aggraver celle-ci. En effet, une personne dépressive peut perdre le goût de faire travailler sa mémoire, elle peut également se décourager et ne plus prendre le traitement qui permet de ralentir l’évolution de la maladie.
Ce symptôme de la maladie d’Alzheimer peut s’expliquer de différentes façons:
– Une atteinte de la partie du cerveau qui régule les humeurs.
– Une prise de conscience de sa perte d’autonomie.
– La connaissance de la maladie et donc la crainte de l’avenir (peur de perdre son autonomie, de devoir entrer en institution, de mourir…)
Accepter le diagnostic de la maladie d’Alzheimer n’est pas une chose facile. Il s’agit de se confronter à des pensées douloureuses. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que la maladie d’Alzheimer est une maladie crainte par beaucoup. Il ne faut pas hésiter à proposer à son proche un accompagnement par des professionnels adaptés.
Identifier la dépression : procédures et critères
Le diagnostic de la dépression nécessite une approche minutieuse.
Un sujet âgé présentant des une apathie, une difficulté à se concentrer, une perte d’appétit, de troubles du sommeil sera suspecté d’avoir un trouble physique. Le médecin fera des prises de sang et des examens plus approfondi (et suspectera parfois un Alzheimer débutant dès le premier entretien). Le diagnostic de dépression ne sera posé que si le médecin n’a rien trouvé ailleurs.
Chez un sujet jeune, c’est souvent l’inverse. Le médecin pensera en premier lieu à une dépression. C’est l’évaluation par un psychiatre puis l’aggravation des symptômes qui orienteront le professionnel vers une maladie d’Alzheimer. Les examens tels que prise de sang, test cognitifs, IRM seront alors proposés.
Il est plus délicat d’être certain qu’un diagnostic de dépression ne cache pas une pathologie sous-jacente. Au moindre doute, des examens doivent être réalisés. En effet, la dépression est une maladie en tant que telle, mais elle peut aussi être le symptôme d’autres maladies.
L’importance du bon diagnostic
Conséquences d’un diagnostic erroné
Un diagnostic incorrect peut avoir des conséquences significatives. Le patient pourrait recevoir des traitements inadaptés, comme des antidépresseurs, sans aborder les causes sous-jacentes de son déclin cognitif. D’ailleurs, les antidépresseurs peuvent augmenter les troubles cognitifs.
Pour la dépression, des thérapies cognitivo-comportementales et des antidépresseurs peuvent être proposés. Des thérapies plus spécifiques sont également proposées en fonction du type de dépression et de sa cause physiologique ou environnementale.
Il est fréquent de pousser une personne atteinte de dépression à sortir, à retrouver ses activités d’avant, à découvrir de nouvelles passions, un nouveau travail. Bien sûr, ce sont des étapes qui demandent du temps, mais l’objectif de changer son quotidien et de découvrir des choses est là. Mais ce n’est pas du tout l’objectif avec une personne atteinte d’Alzheimer qui aura besoin d’être rassurée. Elle aura besoin au contraire de choses connues, de cadres et de routines. Elle ne pourra pas retourner à ses activités d’avant sans un minimum d’adaptation. Le risque de ne pas prendre en compte sa maladie d’Alzheimer, c’est de générer de l’angoisse, des troubles du comportement mais aussi de la mettre en danger.
Une personne atteinte d’Alzheimer aura besoin de stimulation cognitive pour préserver ses capacités. Cette stimulation peut être réalisée par un professionnel ou par un proche (avec la Méthode MALO, par exemple). Une activité physique adaptée peut également aider la personne à rester autonome et à ralentir la maladie.
Un avenir très différents, et des mesures préventives adaptées au diagnostic.
La personne atteinte d’Alzheimer verra ses troubles s’aggraver.
Si la maladie est confondue avec une dépression, cela ralentit le diagnostic. Pourtant un diagnostic précoce a différents avantages pour la personne malade et son aidant.
Le diagnostic précoce permet de commencer au plus tôt à mettre en place des routines faciles pour le quotidien, que la personne va intégrer et suivre pendant des années. Par exemple, il est plus facile pour une personne d’apprendre à utiliser un outil tel qu’un bracelet anti-chutes si elle y a accès en début de maladie que si elle le reçoit quand les troubles sont avancés. Si elle a pris l’habitude de mettre sa montre tous les matins pendant 3 ans, il y a plus de chances qu’elle continue à la mettre ensuite. Son corps aura enregistré l’habitude. (Même si ca ne fonctionne pas à tous les coups, malheureusement)
Un diagnostic précoce permet d’avoir le temps d’anticiper l’avenir. La personne est encore assez lucide pour parler de ce qu’elle souhaite ou non pour la suite. De déterminer qui sera l’aidant qui s’occupera de ses finances, qui prendra les décisions pour elle. Les papiers pourront être fait et ainsi cela évitera les conflits familiaux, et un non-respect des volontés de la personne.
Cela permet de se familiariser doucement avec les aides qui existent. Des dossiers peuvent être anticipés. L’aidant est encore assez disponible pour aller à des formations offertes, ou aller à la chasse aux informations.
Une aide humaine peut être installée, même si ce n’est que pour deux heures dans la semaine. Cela permet d’habituer la personne maladie au fait d’être aidé, mais cela permet aussi d’ancrer le visage de la personne dans les visages familiers.
Un impact différent pour l’aidant
Ce n’est pas la même chose d’être aidant d’une personne en dépression ou d’une personne atteinte d’Alzheimer.
Avoir un diagnostic permet à l’aidant de savoir quel sera son propre avenir. Cela lui permet aussi de commencer le fameux deuil blanc lié à la maladie d’Alzheimer.
Etre informé permet à l’aidant de se préparer tant administrativement, organisationnellement que psychologiquement.
Il peut se faire entourer si besoin. Il peut se former à l’accompagnement. Il sait à quoi s’attendre. Il sait comment adapter son discours.
Il sait que la dégradation des capacités de son proche ne sont pas liées au fait qu’il n’en fait pas assez, ou qu’il ne soutient pas assez son proche. Mais que c’est juste la maladie qui évolue ainsi.
Conclusion
En conclusion, distinguer la maladie d’Alzheimer de la dépression est essentiel pour assurer un diagnostic et un traitement appropriés. Une personne bien guidée et accompagnée gagnera en qualité de vie.
Une approche multidisciplinaire, incluant des évaluations neuropsychologiques et des consultations spécialisées, est essentielle pour éviter les diagnostics erronés et garantir un traitement adapté. Mais l’aidant aussi à un rôle à jouer : consulter dès le début des symptômes, même si cela semble être « juste une déprime ». Car qu’il s’agisse d’une maladie d’Alzheimer ou d’une dépression, les deux doivent être soignée et peuvent avoir de lourdes conséquences.
FAQ
Quelle est la différence entre la dépression et la maladie d’Alzheimer ?
La principale différence entre la dépression et la maladie d’Alzheimer réside dans le caractère évolutif de la maladie d’Alzheimer. Si les symptômes sont au début assez similaires, avec le temps ceux de la maladie d’Alzheimer se distinguent facilement. La dépression chez les personnes âgées peut causer des troubles de concentration, une perte d’énergie et une apparente déclin intellectuel, mais ces symptômes peuvent souvent être améliorés avec un accompagnement psychologique adapté et/ou un traitement antidépresseur.
En revanche, la maladie d’Alzheimer affecte principalement la mémoire à court terme, l’orientation spatio-temporelle et les fonctions exécutives, et ces troubles ne s’améliorent pas avec la psychothérapie et peuvent même s’aggraver avec les antidépresseurs.
Les personnes déprimées sont généralement conscientes de leurs problèmes de mémoire et ne sont pas désorientées, contrairement à celles atteintes d’Alzheimer qui peuvent être indifférentes à leurs troubles de mémoire.
Quelle est la maladie qui ressemble à la maladie d’Alzheimer ?
Plusieurs maladies peuvent ressembler à un début de maladie d’Alzheimer, notamment :
- Démence vasculaire : causée par des mini-accidents vasculaires cérébraux, affectant la mémoire, le jugement et la planification.
- Démence à corps de Lewy : caractérisée par des dépôts de protéines dans le cerveau, avec des symptômes moteurs et des hallucinations.
- Démence de la maladie de Parkinson : présentant des symptômes moteurs et des hallucinations, différente de l’Alzheimer par son impact sur les mouvements.
- Infections des voies urinaires : chez les personnes âgées, causant confusion, somnolence et hallucinations, traitables avec des antibiotiques.
- Déficit en vitamine B12 : provoquant perte de mémoire, agitation et autres symptômes, diagnostiqué et traité par des tests sanguins et des suppléments.
En quoi la démence et la dépression sont-elles similaires ?
La démence et la dépression chez les personnes âgées partagent plusieurs similitudes dans leurs symptômes, bien que ces maladies soient distinctes. Les similitudes incluent l’isolement social, les troubles de la mémoire et de la concentration, des perturbations du sommeil (trop ou trop peu), et une perte d’intérêt pour les activités et les passe-temps précédents. De plus, des variations d’humeur et de la confusion peuvent être observées dans les deux conditions.
Quel est le symptôme le plus observé de la maladie d’Alzheimer ?
Le symptôme le plus remarqué de la maladie d’Alzheimer débutante est la perte de mémoire, particulièrement la mémoire à court terme. Les personnes affectées oublient des rendez-vous, des noms de proches, et ont des difficultés à mémoriser des faits récents. Elles ont besoin d’être rassurées. Elles demandent à ce qu’on leur rappelle les informations importantes ou bien ce mette des mémo partout dans la maison.