Connaître la maladie est très important pour accompagner un proche au mieux, mais aussi pour ne pas s'épuiser au quotidien ou se fâcher avec un proche qui a des réactions inattendues.
Mais aujourd'hui, plutôt que de vous proposer un article de conseils sur la maladie d'Alzheimer, je voulais laisser la parole aux aidants.
Parmi les nombreux messages que je reçois, j'ai sélectionné quelques anecdotes insolites ou tendres qui prouvent que même si cette maladie est terrible, vous pouvez encore vivre de doux moments avec votre proche.
N'hésitez pas à partager vos anecdotes avec nous en commentaires.
Robert | Le MARI
Nous avons presque toujours eu un chien avec mon épouse. Mais quand notre dernier chien, Faron, est décédé, j'ai choisi de ne plus en adopter. Ma femme commençait à avoir des oublis, et je pressentais qu'une maladie d'Alzheimer serait diagnostiquée et nous donnerait déjà beaucoup de travail.
Un jour pourtant, ma femme n'a plus cessé de me parler de chien, comme si nous venions d'en adopter un. Comment allions-nous l'appeler ? Avais-je pensé à acheter des croquettes ? Où avais-je la tête ? Je n'avais pas pensé à installer un panier pour ce pauvre chien...
Je pensais qu'elle faisait référence à notre ancien chien et ne voulais pas lui briser le coeur en lui parlant de son décès. Je lui proposais donc de nommer son chien imaginaire Faron.
Mais elle s'est énervée en me disant qu'on ne pouvait pas appeler le nouveau chien comme l'ancien.
Mais de quel chien me parlait-elle donc ?
À force de discussion, j'ai compris !
Alors qu'elle faisait le ménage, l'aide de vie avait déplacé la peluche chien que nous avions. Et au lieu de la laisser dans le séjour, elle l'avait placé dans le jardin d'hiver. Là où séjournaient nos chiens la nuit et en notre absence, lorsque nous en avions. Pour mon épouse, cet animal en peluche que nous avions sur une chaise de notre séjour depuis des années était devenu notre nouvel ami.
J'ai replacé la peluche sur sa chaise, mais mon épouse s'est inquiétée et pendant deux jours m'a supplié de partir à la recherche du chien.
Quand j'ai cédé et que j'ai remis la peluche dans le jardin d'hiver, Monique était si heureuse, que nous lui avons donné un nom et que j'ai installé un panier pour lui. C'était un chien très docile, qui a accompagné mon épouse jusqu'à la fin.
Caroline | La fille
J'aide maman depuis 8 ans. Et j'avoue que j'ai parfois du mal à prendre du temps pour moi. J'ai donc pris un peu de poids, car je mange mal et j'ai arrêté le sport.
Depuis deux ans maman croit... que je suis enceinte ! Une très longue grossesse visiblement, qui la met en joie.
J'ai essayé de la contredire quelques fois, mais elle se fachait car elle pensait que je mentais et que j'avais quelque chose à cacher au sujet de la grossesse.
Je la laisse donc faire... et elle se plie en quatre lors de mes visites pour préparer ses fameuses madeleines. Dont je fais régulièrement bénéficier la famille et les voisins pour ne pas m'arrondir encore plus.
La maladie de maman est malheureusement très avancée maintenant, mais elle continue à faire ses madeleines alors qu'elle ne sait plus se faire un repas facile. Les aides de vie n'en reviennent pas.
Anne | La fille
Bonjour Amélie,
La dernière fois que nous utilisions la Méthode MALO avec maman, j'ai eu une drôle de surprise.
Il y a une activité avec une recette où la personne doit souligner tous les noms des aliments. Maman était concentrée, puis je la vois commencer à raturer une partie du texte et à gribouiller quelque chose. Je m'apprête à intervenir pour lui répéter la consigne quand elle me temps son carnet en me disant "voilà, je t'ai corrigé la recette... fallait pas s'attendre à un résultat fameux en ne mettant que deux oeufs".
Maman ne cuisine absolument plus et avait arrêté bien avant la maladie, mais elle semble se souvenir des pâtisseries qu'elle faisait.
Et l'autre jour, au téléphone, elle m'a demandé ce que j'avais pensé de sa recette. Elle se souvenait donc de l'activité.
Elle passe de bons moments avec la méthode malo et je trouve que ça l'éveille à nouveau. En tout cas, je suis preneuse de vos idées pour continuer sur le thème de la cuisine qui semble lui plaire.
Suzanne | La fille
Maman refuse de s'habiller dans des vêtements modernes. Elle a toujours été à la pointe de la mode. Sauf qu'elle se croit maintenant dans les années 70.
Ma fille, qui adore les friperies et vide-greniers déniche des pièces vintage pour sa garde-robe, et pour celle de sa grand-mère. Ma mère prend ma fille pour une de ses amies et parle longuement mode et chiffons avec elle.
Michel | Le Fils
Mes parents sont divorcés depuis plus de vingt ans.
Je n'avais plus de nouvelles de mon père depuis des années, mais je suis resté très proche de maman qui a développé une maladie d'Alzheimer. Malheureusement, comme elle se mettait régulièrement en danger (en voulant monter dans le grenier ou laver les vitres, entre autres), elle a déménagé en ehpad.
Peu de temps après, j'ai été convoqué par l'équipe soignante pour m'apprendre que maman avait un "amoureux". Ils demandaient aux familles comment réagir.
Quelle surprise, quand j'ai réalisé que cet amoureux était... mon père ! Atteint d'une forme de démence, lui aussi.
Mon père est veuf, maman ne s'est jamais remariée. Ils sont comme de jeunes amoureux.
Si j'ai du mal à pardonner certains comportements qu'a eu mon père envers ma mère, je n'en laisse rien paraître. Aucun des deux ne s'en souvient, et la vie a clairement voulu que leur histoire ait une deuxième chance.
Ce qui m'impressionne, c'est que j'ai l'impression qu'ils ne font pas le lien avec les personnes qu'ils étaient avant. Ma mère ne se rend pas compte que son Marcel a beaucoup de points communs avec son ex-mari. Je me demande si elle lui parle de son ex, parfois. Et comment lui réagit.
Une histoire folle grâce à laquelle je me suis découvert une demi-soeur avec qui partager les étonnements et craintes face à la maladie d'un proche.
Suzanne | La fille
Ma mère m'avait acheté un cadeau d'anniversaire. Sauf qu'elle ne savait plus où elle l'avait mis. Nous avons cherché ensemble en rigolant toute l'après-midi. Et nous avons au passage retrouvé de nombreux trésors et souvenirs (ce que ma mère a adoré, car elle a pu me raconter le passé avec de nombreux détails).
Son oubli s'est transformé en bon moment tous les deux. Il suffit de peu de choses.
Laure | La petite-fille
Bonjour Amélie,
Je vous écris pour vous dire que nous avons beaucoup aimé vos idées et conseils pour fabriquer une carte de voeux.
Mamie s'est appliquée et a pris beaucoup de goût à décorer sa carte. Je pense que cela lui manquait de faire des activités créatives, mais je n'avais aucune idée de ce que je pouvais lui proposer avec sa maladie.
Ce qui est amusant, c'est qu'elle m'a demandé d'écrire sa carte à sa place. Une carte qui était destinée à Laure, sa petite-fille qui est partie pour des études, mais qui est très présente dans son coeur.
Laure, c'est moi. Mes études sont finies, et ça me fait fondre de tendresse de voir comme mamie parle de moi, même si elle ne me reconnaît plus.