Amélie Wallyn

Suicide de la personne âgée : comment le prévenir ?

suicide de la personne âgée

Le suicide des personnes âgées est souvent un sujet tabou. On en entend rarement parler dans les médias. Pourtant, le risque de suicide existe, même après 60 ans ! Les suicides des personnes de plus de 65 ans représentent un tiers des suicides en France ! A l’approche de la journée européenne de la dépression (27 octobre 2015), parlons donc enfin du suicide et de la dépression de la personne âgée, afin d’en prévenir les risques.

Le suicide de la personne âgée :

Le suicide est responsable de 3 000 décès par an chez les plus de 65 ans. Cela s’explique par le fait que la dépression touche 15 à 25 % des personnes âgées et par le fait que les personnes âgées qui tentent de se suicider y arrivent bien souvent. En effet, on compte en moyenne 1 suicide réussi pour trois tentatives chez les femmes de 65 ans, contre 1 suicide pour 160 tentatives pour les jeunes de 20 ans. Les personnes âgées utilisent des moyens radicaux pour se suicider (pendaison, arme à feu…).

Profil des personnes âgées qui se suicident : 

Le Dr. Véronique Lefebvre des Noettes (Gériatre/Psychiatre, Hôpital Émile Roux, grand centre de gériatrie de l’AP-HP) a défini le profil des personnes âgées qui font des tentatives de suicide.

Les personnes qui se suicident sont :

  • majoritairement des hommes : 2/3 des personnes âgées qui se suicident sont des hommes.
  • seuls. Ils sont veufs et n’ont pas d’enfant proche de chez eux. Ils n’ont pas de vie sociale car ils sont à la retraite et n’ont pas d’activité sur l’extérieur.
  • nombreux à résider en Bretagne ou en Picardie : ces régions font partie de celles où il y a le plus grand nombre de suicides.
  • à 90% des personnes souffrant de dépression et non d’autres pathologies psychiatriques.

Ce dernier point est important. En effet, on sait que 90% des personnes âgées faisant une tentative de suicide présentent une dépression, or la dépression est rarement repérée chez les personnes âgées. Dans 60 à 70% des cas, les symptômes dépressifs ne sont pas diagnostiqués ou sont négligés.

Pour éviter les suicides, parlons donc un peu de la dépression des personnes âgées afin de la repérer chez votre proche s’il venait à en souffrir.

Quels sont les facteurs de risque de la dépression de la personne âgée ?

symptomes dépression

Il existe différents facteurs qui augmentent le risque de faire une dépression pour les personnes âgées.

  • Deuil : la perte de l’époux ou de l’épouse est une épreuve que vivent de nombreuses personnes âgées. Mais il y a également la perte d’amis proches ou de frères/sœurs ainsi que parfois, malheureusement, le deuil d’un enfant ou d’un autre proche.
  • Manque de relations sociales : nombreuses sont les personnes âgées à ne pas avoir d’enfant ou de petit-enfant proche géographiquement. Ces personnes se retrouvent parfois privées de relations familiales. Mais elles n’ont également plus de relations professionnelles et ont parfois également des difficultés à avoir d’autres relations sociales. En effet, les personnes âgées sortent moins et rencontrent donc moins de personnes avec qui se lier et échanger.
  • Poids des événements de la vie : quand on arrive à un certain âge, il est fréquent d’avoir vécu des choses douloureuses qui peuvent continuer à nous hanter. Par ailleurs, en vieillissant, d’autres événements peuvent avoir des conséquences sur notre moral : le passage à la retraite, un déménagement pour un domicile plus petit, le décès des amis du même âge ou leur entrée en institution…
  • Perte d’autonomie et problèmes de santé : malheureusement, le nombre de pathologies augmente avec l’âge et les douleurs aussi. Les personnes âgées souffrent plus régulièrement, peuvent avoir des difficultés à se déplacer à cause de l’arthrose ou de problèmes cardiaques, sont parfois amenées à accepter des diagnostics comme celui de la maladie d’Alzheimer.
  • Manque d’estime de soi.
  • Problèmes financiers : Vieillir peut entraîner une baisse des revenus conséquente, suite à la retraite notamment. Par ailleurs, si la personne a des problèmes de santé, elle peut être amenée à dépenser beaucoup d’argent dans les soins ou dans les services (payer quelqu’un qui fait ses courses ou entretient son jardin). Le fait de devoir maîtriser ses dépenses et ne pas s’offrir ce qui nous fait plaisir ou ce qui ferait plaisir aux petits-enfants peut être source de tristesse. Et le fait de ne pas savoir comment on va finir le mois est source d’angoisse. Tout cela favorise le développement d’une dépression.

Comment repérer les symptômes de la dépression ?

suicide de la personne âgée

Vous ne savez pas si votre proche est dépressif et s’il risque de faire une tentative de suicide ? Il y a plusieurs symptômes qui peuvent faire penser à une dépression et qui doivent vous amener à évoquer le sujet avec le médecin traitant de votre proche :

  •  Symptômes de la dépression (de la personne jeune à la personne âgée) :

Anxiété.

Pessimisme : souvent en lien avec l’anxiété. La personne voit le mauvais côté des choses. Elle voit ses difficultés plus que les choses positives qu’il y a dans sa vie. Elle s’imagine que chaque situation va mal tourner, que les maladies vont empirer…

Dévalorisation : la personne manque de confiance en elle, a une vision négative d’elle-même et se juge méchamment.

– Anhédonie : Il s’agit de la perte du plaisir. La personne prend moins de plaisir à déguster sa pâtisserie préférée, à voir les membres de sa famille, à imaginer ses prochaines vacances…

– Troubles neurovégétatifs et ralentissement psychomoteur : la personne n’a plus d’appétit et perd du poids, elle a des troubles du sommeil (dort trop ou pas assez, fait des cauchemars), elle est moins vive d’esprit et moins dynamique.

  • Symptômes de la dépression chez la personne âgée :

– Hypocondrie : on a tous déjà eu mal au ventre lors d’un stress, ou été fatigué un jour de déprime. La personne âgée en dépression peut avoir des douleurs, des symptômes de maladie physiques.

-Repli sur soi : la personne s’isole. Elle ne prend plus la peine de téléphoner à ses enfants, d’aller saluer son amie du quartier.

Impression d’être inutile : sensation de vide intérieur, impression que la vie ne vaut plus la peine d’être vécue.

-Angoisses matinales : les angoisses sont plus fortes au matin et diminuent au cours de la journée. 

-Troubles de la mémoire : ces troubles ne sont pas à mettre en rapport avec une démence ou avec la maladie d’Alzheimer. Cela est en lien avec le fait que la personne âgée dépressive ne s’intéresse plus aux choses et ne prend pas la peine de les écouter et de faire le processus de les retenir.

Dépendance : la personne âgée dépressive peut ne plus être capable de sortir seule, de faire ses courses ou même de se laver.

Attention ! Il n’est pas nécessaire que votre proche présente tous ces symptômes pour le considérer comme étant à risque suicidaire ! Il est important de prévenir le médecin traitant dès l’apparition d’un ou plusieurs des symptômes listés. 

Je pense que mon proche est dépressif : que faire ? 

Avant tout, il faut en parler au médecin traitant qui évaluera la situation. Il pourra prescrire s’il le faut des antidépresseurs ou un traitement à base de médecine douce (homéopathie, luminothérapie…). Un suivi par un(e) psychologue ou un(e) psychiatre pourra également être proposé.

De votre côté, vous pouvez également agir pour aider votre proche.

-Vous pouvez l’aider à conserver une vie sociale : en lui rendant visite, en organisant des repas de famille. Vous pouvez faire sortir votre proche en l’emmenant faire des courses ou boire un café à l’extérieur. Le fait de ne pas être chez soi et de voir des gens circuler et discuter peut être bénéfique. Vous pouvez également l’inciter à se rendre dans un club d’activités ou à des sorties pour personnes âgées, proposés par certaines villes ou par des organismes privés.

-Vous pouvez revaloriser votre proche en pratiquant avec lui des activités pour lesquelles il est doué. Des petites choses peuvent également aider : des compliments sincères, demander la recette de sa fameuse blanquette, demander un coup de main pour réparer votre réveil…

-Vous pouvez aussi l’écouter ou l’aider à trouver une personne à qui il/elle pourra se confier. Ce n’est pas forcément évident de tout dire à ses enfants ou à son mari/épouse, et si la personne n’a plus d’amis proches, elle se retrouve seule avec ses pensées intimes et douloureuses.

N’ayez pas peur de mal faire. Il n’y a pas une seule manière d’aider une personne en dépression, mais il y en a autant qu’il y a de personnes en dépression. Un jour, votre proche peut avoir besoin du noir, un autre jour du blanc. L’important, c’est de ne pas le laisser tomber et peu importe si un jour il se fâche à cause d’une chose que vous aurez dite ou faite, le lendemain il vous remerciera pour cette même chose ou pour une autre.

La dernière chose qui n’est pas à négliger est : Prenez soin de vous !  Vous ne pourrez pas aider votre proche si vous n’êtes pas bien dans votre peau. S’il vous sent épuisé, il se sentira comme une charge pour vous. Si vous êtes stressé, vous risquez de lui communiquer votre stress. Vous voulez réapprendre à votre proche comment prendre soin de lui et être épanoui ? Alors soyez-le vous-même ! Continuez à voir votre famille, vos amis. Faites les activités qui vous détendent. Vous n’êtes pas aidant à temps plein !

A propos de l'auteur Amélie Wallyn

Ergothérapeute et co-auteur de la méthode MALO, je partage mes conseils et outils pour vous aider à maintenir votre proche à domicile le plus longtemps possible !

Ne partez pas sans nous laisser un petit commentaire :)

  • Les chiffres font froid dans le dos, je n’imaginais pas que le risque était si important pour nos aînés !
    Je vais être d’autant plus attentive aux signes avant coureur, merci pour cette prise de conscience qui peut sauver des vies….

    • Merci Aurélie. J’ai justement écris cet article parce qu’il me semble qu’informer les gens permettra de réduire le nombre de suicide de personnes âgées. On a rarement conscience de ce que vivent nos aînés. On estime qu’avec l’âge on devient patient, qu’on a l’expérience de la souffrance et que l’on sait mieux la gérer. On relativise du coup ce que nos aînés vivent sans imaginer tout ce qu’ils ont à supporter et à quel point leurs émotions peuvent être vivantes et violentes.

  • {"email":"Email address invalid","url":"Website address invalid","required":"Required field missing"}

    Autres articles qui pourraient vous intéresser...

    >